Vendredi

18 août 2023 § Poster un commentaire

Dix-Huit août

Sept heures et cinquante quatre minutes. Il est bientôt l’heure de partir au travail. J’ai enfilé des sous vêtements noirs et je me suis installée sur le petit bureau. C’est drôle car c’est lorsque je suis au plus mal que je m’autorise à imposer certaines exigences, à moi-même et aux autres.

Je suis terrifiée par le temps qui s’écoule tel un filet d’eau qui nous glisse entre les doigts. Ne peut-on jamais l’attraper un peu ? Et le garder précieusement dans une petite boîte pour le distribuer quand cela nous chante. Je me répète que, justement, puisque j’ai conscience de ce temps qui court tout droit là où tu sais – je devrais profiter pleinement de chaque minute qui passe. Mais je suis obnubilée par cette notion. Le vieillissement. Finalement, peut-être n’est ce pas le temps qui m’effraie mais plutôt l’impact qu’il a sur nous. Nous vieillissons, inéluctablement. Le corps s’épuise, se rouille un peu, les gens que nous aimons passent et trépassent, l’hiver revient toujours. Mes grands-parents s’approchent d’une sortie où on ne pourra plus les accompagner, où tout ce qu’il existe de ces deux grandes personnes disparaîtra, ne laissant qu’une trainée de souvenirs à l’intérieur de nous.

J’ai peur de la mort. Elle est si intense et mystérieuse. On ne peut pas la toucher, on ne peut pas la saisir et la disséquer. Elle est ce qu’il y a de plus impénétrable dans la vie. Elle me terrorise. Je ne cesse de calculer, qui (potentiellement) a déjà vécu au moins la moitié de sa vie. Mes parents en font partie. Mais pire : peut-être même que Lui s’approche dangereusement de cette moitié.

La folie me terrorise aussi : perdre le contrôle de ce véhicule qui me permet tant de choses. Perdre le fil de mes pensées, le contrôle de mon cerveau et ne pouvoir rien y faire. Ah ! Je crois finalement que ce qui me terrorise le plus sont ces choses auxquelles on y peut rien. Elles sont nombreuses. Mais dans le fond je crois que ça fait ‘partie du jeu’, non ?

Jeudi

13 avril 2023 § Poster un commentaire

Treize avril

Pourquoi est-ce si dur de coucher sur le papier chacune de mes pensées ? Mes doigts pianotent quelques mots puis, inévitablement, s’attardent sur la touche « retour arrière ». J’efface et je laisse les lignes blanches me rappeler mon désarroi face à ce silence. J’ai pourtant essayé d’hurler, étalant ma peine sur la table, la servant à toutes les sauces, espérant que quelqu’un la saigne. J’ai tenté de lui faire une place à l’intérieur, qu’elle s’installe confortablement pour que nous puissions déambuler vers le soleil couchant, main dans la main. Mais rien n’y fait : dehors ou dedans elle cogne si fort que je ne m’entends plus. Et plus personne ne m’entend.

Les pensées se font nombreuses et jamais ne s’arrêtent de flotter. Je ne sais plus si il s’agit de peine ou de colère ou d’un mélange amer des ces deux entités. Elles deviennent des amies que je n’ai jamais demandé et m’accompagne toujours malgré toutes ces années. Si je me relis, je ne vois que mélancolie bordée d’un peu de poésie , la « mélancoésie». Cet état fameux où il est, étrangement, plus aisé de créer.

Mercredi

1 mars 2023 § Poster un commentaire

Premier mars

Parfois, il suffit de peu. Quelques livres, un paragraphe qui frappe, comme une claque qu’on recevrait sur le coin de l’esprit, là où la lumière passe encore. Parfois, il suffit de peu, plusieurs petites bribes qui s’immiscent de ci, de là. Une phrase attrapée à la volée qui s’entiche de nos pensées. Elle reste là, malgré le brouhaha ambiant, malgré le vacarme du monde, quelques mots s’accrochent et s’attachent à nous faire grandir.

Lundi

20 février 2023 § Poster un commentaire

Vingt février

Huit ans. Joyeux anniversaire « Mon Journal ». Je ne vais pas mourir, enfin pas dans l’immédiat. Je me souviens du jour où je t’ai crée, où les mots se sont alignés ensemble pour devenir des souvenirs déposés là, sur le blanc de l’écran. Je venais de parcourir les mémoires d’un homme mourant et je m’étais demandé pourquoi s’écrire uniquement lorsque la fin approche / est proche ? Pourquoi ne pas tatouer les mots sur la toile quand on se sent plus vivant que jamais ? Même si, dans le fond, c’est prétentieux d’assurer que je ne vais pas mourir sans savoir de quoi sera faite la seconde suivante. Peut-être n’aurais-je même pas le temps de finir cet article ou peut-être pourrais-je encore en écrire des milliers, pendant les huit prochaines années.

J’écrivais à V ce matin. Pour lui dire que je vais mal et que c’est sûrement la première fois que je vais aussi mal. Mais j’ai l’impression d’avoir déjà dit ça un million de fois. Cette fois, des symptômes physiques viennent traduire mon mal-être, celui que je repousse. Dans le fond, j’espère secrètement que ces symptômes sont bien psychologiques et qu’ils ne sont pas la conséquence d’autre chose – d’incontrôlable.

Enfin, pour l’instant, ma dépression n’est pas plus contrôlable qu’un vulgaire cancer qui prend toute la place dans mon quotidien. C’est la première fois que j’utilise cette expression : « ma dépression ». Habituellement, je parle de petite déprime, d’un peu de tristesse, d’un léger mal-être. Pourtant elle est tout le contraire : elle est énorme, affreuse, elle est grande peine et terrible colère, elle est un amas d’émotions et de souvenirs qui ne savent pas cohabiter.

Alors je serre les mâchoires, je hausse les épaules. J’ai des maux de tête incessants, les trapèzes raidis, la tête s’embrouille, les oreilles tambourinent. Un nouveau symptôme apparait régulièrement, parce que je n’écoute pas. Je prends rendez-vous chez l’ORL, chez l’ostéopathe, j’ai même une IRM à faire (des cervicales) et puis je dois aller chez une magnétiseuse, ce que je n’assume pas – étant plutôt une adepte de ce qui se prouve et se voit.

Mais dans le fond c’est l’âme qui a besoin de guérir et l’esprit qui est épuisé. Y a-t-il des médecins de l’âme et des cœurs brisés ?

Vingt Février. Huit ans de ce journal d’une femme qui ne va pas mourir. Et encore beaucoup de bordel émotionnel.

Mercredi

23 novembre 2016 § 9 Commentaires

Il avait les cheveux en broussaille.

De ces coupes qui s’installent au réveil, cette petite mèche qui se rebelle, l’épi indocile. Aujourd’hui, il avait les cheveux en broussaille. Et, oh comme il était beau.  Je l’ai vu et je n’ai eu nul besoin de l’ouïr, nul besoin d’espérer un de ses sourires, nul besoin de savoir de quel pied il s’était levé. Il était beau. Point barre.

Je n’ai pas eu les papillons dans l’abdomen, comme ils se plaisent à le formuler dans les films. Ni papillon, ni frisson, ni un cœur qui saute. Non, rien de tout ça. Il était là, en train de me préparer à manger et il était beau. Alors j’ai eu chaud. Alors j’ai compris quel amour  je lui portais.

Il ne s’agit pas de cet amour que l’on ressent à 16ans. Celui qui brûle et consume, celui qui embrase les boyaux, qui fait tantôt très mal, tantôt beaucoup de bien. Cet amour que l’on croit invincible. « Toujours pour toujours ». Non, il ne s’agit pas de cet amour-là.

Je n’aime pas l’amour. Je veux dire, je n’aime pas pour aimer. Je l’aime lui. Je ne peux me passer de ses yeux bleus, de son sourire. Je ne peux me priver de ses câlins, de sa tendresse, de sa créativité, de son ingéniosité, de son talent. Je suis amoureuse de ses défauts, de sa façon de réagir lorsqu’il est contrarié, de son pessimisme qui parfois m’oblige à être si optimiste qu’il m’en pousserait presque des ailes.

J’aime être avec lui. Pas parce qu’il m’aime, pas parce que j’aime être avec quelqu’un, pas parce que je suis amoureuse de l’amour. J’aime être avec lui parce que c’est un homme généreux, parce qu’il est bon, parce qu’il est la meilleure personne que je connaisse.

Je l’aime de cette façon. Je suis si amoureuse de sa personne que je doute pouvoir lui survivre. Enfin je veux dire, cet amour m’apprend, me donne, me pousse en avant, me comble. Grâce à lui. Alors sans tout ça, je ne suis que poussière.

Et parfois on se chamaille, parfois nous nous aimons un peu moins, parfois nous en avons marre, parfois. Mais jamais je n’oublie cet amour-là, je sais qu’il reste là, attendant que la tempête passe. Je sais que cet amour n’est pas celui qui consume plus qu’il n’instruit. Cet amour-là est celui qui transporte parce qu’il est inconditionnel. Parce qu’il n’attend rien.

Peu importe ce qui pourrait nous arriver, je ne suis pas naïve. Je serai toujours amoureuse de cet homme-là, qui vit aujourd’hui à mes côtés. Peu importe, cet amour-là ne meurt jamais vraiment.

Mercredi

21 septembre 2016 § 9 Commentaires

Vingt-et-un septembre

Est-ce qu’il y a des gens qui sont naturellement malveillants et pour qui nous ne pouvons rien faire ? Cela m’afflige de raisonner ainsi. J’aimerais sauver tout le monde, diriger le regard de ces personnes et leur montrer que la méchanceté n’est pas motrice mais destructrice.

Mais plus je croîs, plus j’évolue, je m’aperçois qu’il y a des personnes qui ne peuvent changer. Qui ne savent virevolter le regard. Comme si l’animosité était frappée sur leur visage, à l’encre inaltérable et qu’aucun sourire ne peut la déloger. Ça me rend éplorée, vraiment triste.

Lui – Le pervers

6 septembre 2016 § 8 Commentaires

Il faut tomber loin pour se relever un peu plus grand à chaque fois.

Je commence à comprendre certaines choses.

Il y a un peu plus de deux ans, je quittais le pervers narcissique. J’ai d’abord pensé – à tort -que la personne que j’étais avant de le rencontrer reviendrait petit à petit. Ensuite j’ai pensé – à tort – que la personne que j’étais avec lui disparaitrait petit à petit. Puis est venu un moment de détresse totale où j’ai pensé que la personne que j’étais avec lui resterait figée en moi à jamais. Je suis également passée par ce moment où je ne savais même plus quelle personne j’étais. Celle d’avant ? Celle du pendant ? Celle d’après ? Celle de maintenant ? Comment me définir ? Qui suis-je ? Et qu’aies-je perdu/gagné de moi pendant toutes ces années ?

Un long couloir sombre que je traverse depuis plusieurs années. Le corridor. Il y fait un peu froid mais parfois je m’y sentirais presque bien.

Et deux ans plus tard, je commence à comprendre certaines choses. Je suis le savant mélange de toutes ces filles. Je ne peux me définir comme étant une personne en particulier, figée dans le temps. Je suis en constante évolution, j’alimente ma personnalité et les personnes qui me touchent l’alimentent également.

Alors parfois, oui, j’aimerais appuyer sur la touche « Echap » ou « Annulé », enfin quelque chose dans ce genre. Pour rayer ces 5 années de détresse totale et reprendre ma vie là où je l’ai laissé, c’est-à-dire en 2008. Parce que c’est l’impression que j’ai eu pendant longtemps. D’avoir laissé ma vie là-bas et de continuer à avancer sans elle.  J’avais 16 ans quand je l’ai rencontré. Alors forcément, il est partie intégrante de mon histoire de jeune adulte.

Mais à quoi bon ? Pourquoi ressasser sans cesse ces regrets, ces remords, ces peurs ? Je n’ai aucun contrôle sur les faits de mon passé, tout ce que je peux contrôler c’est ce que je décide d’en retirer. Et ça, moi seule peux le faire.

On y arrive : Laisser s’échapper les choses qu’on ne contrôle pas.

Je continue de dire que « Je commence à comprendre » parce que non, la route n’est pas finie. Il y a encore pleins de choses qui me sont inconnues ou invisibles. Il y a encore du chemin. Et puis, finalement, je dirai toujours que « je commence à comprendre » et non pas que « j’ai compris » car c’est la certitude qui rend fond et non le doute.

Enfin. Il faut que vous sachiez. On l’appelle pervers narcissique mais peu importe le nom qu’il porte. Peu importe qui il est. Il fait mal. Il blesse, humilie, agresse, harcèle, manipule, viol. Je l’ai vécu. J’ai été blessée, humiliée, agressée, harcelée, manipulée et violée. Je pèse mes mots. Ils sont graves. Et dur à exprimer puisque notre société peine à les accepter, à les comprendre à leur juste valeur. Il faudrait que je mette des faits réels sur ces mots pour qu’on me comprenne plus facilement mais je refuse de raconter les sordides détails de ce passé.

Alors se reconstruire, par la suite, demande beaucoup d’énergie, d’efforts, de « Je vais mettre fin à mes jours, parce que je n’en peux plus ». Oui. Beaucoup. Et même 2 ans après, je ne suis pas guérie. Pas encore.

Mais, je commence à comprendre ….

Et je commence à laisser partir les choses que je ne peux contrôler. Je commence à accepter avoir vécu tout ça. Je commence à accepter la personne que je suis, que je deviens petit à petit. Je commence à me retrouver un peu, à comprendre mes mécanismes.

Je recommence à peine à vivre.

Lundi

29 août 2016 § 10 Commentaires

Vingt-neuf août

La reprise.

La vie fourmille à nouveau, tout autour. J’entends chanter les moteurs et claironner les voix. La vie devient tout à coup plus impérieuse, asphyxiante, le temps presse. Il perd son abondance, devient précieux ou miséreux. On se renferme, à double tour.

Est-on réellement obligé(s) de l’habiter cette reprise ? Est-on obligé(s) à quoique ce soit ?

Oui. On peut penser que ce grouillement de nouvelles routines n’est pas une obligation mais un choix. Mais lorsqu’il n’y a qu’un seul choix comment appelle-t-on cela ? On raccommode nos lundis avec nos vendredis soirs et on part fourmiller dans le train-train de toujours.

La ville pullule à nouveau, elle foisonne, elle grouille.

Jeudi

21 juillet 2016 § 3 Commentaires

Vingt-et-un juillet

Ah, toi, ma vie. Tu me fais tourner en rond. J’enchaîne les mauvais choix et je regrette. Je le fais tellement. Tu préfères les regrets ou les remords ? Je ne sais pas. Sûrement aucun des deux mais nous sommes destinés à, indubitablement, ressentir l’un et l’autre. Parfois les deux en même temps. Beaucoup de regrets. Qui ne me font absolument pas avancer. Ils me figent à mon passé, comme si je n’arrivais à détourner le regard.

Je regardais à travers moi, au travers des cendres que j’ai laissé. Je regrette. Vraiment.

A travers moi, il y a le vide. Et la vie juste après.

Mercredi

29 juin 2016 § 1 commentaire

Vingt-Neuf Juillet

 

Et si on s’aimait, genre pour la vie ? Tu vois ? Si on arrêtait d’aller mal. Si on commençait à jubiler ? Il n’est jamais trop tard pour s’exulter. La vie qui tourne en rond, toujours. Elle tourne en boucle trop vite, mon corps est malmené, ma vie est engourdie.

Je travaille alors je suis absente. Ici et encore plus dans mon esprit.

J’ai cru que le soleil était en train de revenir. Et puis, en fait, non. C’était juste un reflet.

Où suis-je ?

Entrées taguées vie sur Journal d'une femme qui ne va pas mourir.